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Licence Creative Commons Journée d'études - Présence(s) animale(s) - introduction de la journée - Clotilde Thouret

7 octobre 2022
Durée : 00:05:05
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Introduction de la journée - Clotilde Thouret

Le programme d’agrégation de littérature comparée pour les sessions 2022 et 2023 rassemble
cinq fictions de métamorphoses qui articulent animalité et humanité selon des modalités et des
devenirs variés : L’Âne d’or d’Apulée, « Le colloque des chiens » de Cervantès, La
Métamorphose et « Rapport pour une académie » de Kafka et Mon oncle le jaguar de l’auteur
brésilien Guimarães Rosa. L’hybridation permet une expérience de l’animalité ouvrant sur des
explorations fictionnelles diverses (exploration du monde, du langage, d’une autre sensibilité,
d’une autre subjectivité, etc.). Aussi, outre sa reprise de perspectives classiques comme le
mythe de la métamorphose, la tradition de la satire et le conte fantastique, ce programme
s’inscrit également dans un champ de recherche en plein développement : la zoopoétique qui
se donne comme tâche critique de voir comment le langage humain littéraire peut
expérimenter l’irréductible du vivant (Anne Simon, Une bête entre les lignes, Wildproject,
2021). Les incursions imaginaires dans les expériences animales suscitent en effet un
décentrement cognitif, éthique et esthétique, offrent un tiers- lieu où penser, où figurer notre
rapport au monde et aux autres espèces.
Nous proposons d’organiser la réflexion de cette journée à partir de la notion de présence
animale, à travers ses formes et ses enjeux, dans les textes du programme et au-delà, afin de
ménager des perspectives plus larges. On s’intéressera ainsi à la spécificité et à la nature de la
présence animale dans les récits, aux rencontres avec d’autres animaux et d’autres règnes, à la
présence à soi de l’animal, aux implications et aux perceptions de sa présence.
Si cette journée s’inscrit dans le cadre du programme de littérature comparée de l’agrégation
de Lettres modernes, et s’adresse donc d’abord, placée en début d’année universitaire 2022-
2023, aux préparateurs et aux agrégatifs, elle se veut aussi l’occasion de contribuer à l’essor
actuel en SHS d’une dynamique de recherche autour des questions animales. Il s’agira donc
d’enrichir la réflexion autour d’une problématique commune celle des fictions animales en
invitant des chercheurs et des chercheuses issus de spécialités diverses à présenter leurs
approches et méthodologies, afin d’ouvrir des perspectives culturelles et académiques suscitées
par ce corpus et de répondre aux attentes d’un public plus large
Récurrente dans les analyses, centrale dans les textes, la notion de présence animale, si elle a
fait l’objet d’études, reste encore largement à explorer. Elle peut s’appuyer sur des pensées
puissantes et pionnières : celle de Jacques Derrida, suscitée par la présence de son chat
(L’Animal que donc je suis, 2006) ; celle de John Berger, qui est habitée de part en part par les
animaux, notamment à travers le motif de l’échange de regards, qui convoque notre commun
et notre différence avec eux, ou encore à travers leurs présences qui ouvrent sur d’autres ordres
du visible (Pourquoi regarder les animaux ?, 2009) ; celle Jean-Christophe Bailly, qui explore
la façon dont les animaux habitent un territoire et dont leur présence nous déplace (Le Versant
animal, 2007, et Le Parti pris des animaux, 2013) ou encore celle que développe l’historien
Éric Baratay (Biographies animales. Des vies retrouvées, Seuil, 2017).
La réflexion cherchera à cartographier les diverses modalités fictionnelles, narratives et
stylistiques de cette présence à travers ses formes littéraires. On peut d’ores et déjà décliner
plusieurs lignes possibles de réflexion :
Comment les fictions animales décrivent-elles l’ouverture à d’autres ordres du visible, à
d’autres mondes ? Comment donnent-elles ou non accès à un point de vue animal ou à une
subjectivité animale ?
En quoi le travail d’écriture permet-il de nous rendre l’animal présent ? Quels dispositifs
énonciatifs et quels choix stylistiques participent à incarner linguistiquement au cœur du texte
cette présence animale ?
L’animal est souvent invisible, il se glisse dans un terrier ou dans ses cachettes. Dès lors,
qu’en est-il de sa présence à soi et de sa présence aux autres ? On se demandera comment cette
singularité trouve à s’inscrire dans les récits. On interrogera aussi la manière dont se traduit une
certaine qualité sensorielle qui le caractérise et comment le texte littéraire traduit ou représente
cette « adhérence à soi et au monde », cette « immédiateté du vivant à lui- même » (Bailly).

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